Oui, l’histoire se répète ….tous ceux qui de près ou de loin ont participé à des luttes sur le terrain, fait de la rue l’espace d’expression des libertés, de la justice sociale, de la défense des milieux de vie, de la biodiversité, d’un monde sans chimie ni déchets radioactif,  d’une terre qu’on puisse encore appeler « planète bleue » parce que l’eau y est le bien le plus précieux, savent que le droit de manifester a fait long feu dans notre douce France techno libérale. Manifestation autorisée, oui ! Qui ne dérange pas, ne bloque pas, ne crie pas, n’enrage pas, ne revendique pas… ne vit pas quoi !

C’est à dire une manifestation qui ne manifeste rien. Un déni de manifestation, une mascarade. Sans quoi la manifestation devient, sans crier gare, dans les bouches de tous les médias et de l’état, une émeute, une insurrection, un appel à la violence, une barbarie, une  guerre !

Chacun sait bien que tout militant et bien plus encore « le militant écologiste », est un dangereux terroriste en puissance . démontage de Mc Do, fauchage de champs OGM, occupation de territoire interdits, Zadistes, un empêcheur de tous poils, contre les aéroports, les barrages les centrales nucléaires, les data center, les centres commerciaux, les autoroutes…  obscurantiste et finalement complotiste…

Comment ne pas considérer, après ce terrible et terrifiant portrait du militant écolo dressé par  le gouvernement et ses sbires aux ordres, les bien nommées « forces de l’ordre », comme les garantes de la démocratie, de la liberté d’entreprendre et de la préservation de la vie ! C’est évident, heureusement que 3200 flicaillons ont fait le déplacement à Sainte Soline, équipés et armés jusqu’au dents, pour venir défendre un trou noir, destiné à sauver des futures sécheresses l’agriculture intensive « écologique », toujours en vogue chez les agro-technocrates de la FNSEA !

De la part des « gens-d’armes » et de leurs donneurs d’ordre, il ne peut y avoir de violence, puisque les dites opérations de maintien de l’ordre, ne sont jamais que des rappels à la loi et de la loi. Du moment que la loi n’est pas respectée, l’état justifie et systématise l’emploi de la force, de la violence armée, fusse pour défendre un simple trou au prix de blessés, de mutilés, de personnes dans le coma, voire de morts, comme en témoigne le lien France culture ci dessous.

L’écrivain Alain Damasio distingue deux types de violences à l’oeuvre actuellement lors des manifestations, qu’elles s’inscrivent  dans les luttes sociales ou écologiques. Il y a d’une part la violence contre les biens (matériel, installations techniques, mega bassine, machines, canon à neiges…) qui est le fait de certains militants radicaux, sans aucune conséquences en terme de mise en danger d’autrui et de la vie humaine. Le matériel se répare et se remplace et les assurances payent. D’autre part on observe la violence dirigée délibérément contre les personnes, organisée par le ministère de l’intérieur et les préfets.

La première est bien entendue hors la loi  alors que la seconde est parfaitement légale et justifiée par le gouvernement et répond au Schéma National de Maintien de l’Ordre édicté par le ministère de l’intérieur en décembre 2021. 

https://www.interieur.gouv.fr/sites/minint/files/medias/documents/2021-12/schema-national-du-maintien-de-l-ordre-decembre-2021.pdf

Comme nous avons  franchi depuis 2016, la ligne rouge de ce que la philosophe Myriam Revault D’Allones appelle l’ère de la post-vérité, il ne s’agit plus pour le gouvernement de prendre des décisions au regard de la réalité des faits, fût elle complexe à décrypter, mais d’établir ce que la philosophe nomme encore une réalité alternative. Trump et ses conseillers en furent en 2016 parmi les premiers stratèges.

Si Damasio évoque les deux formes de violence que l’on peut observer dans les évènements actuels, il convient de resituer ces dernières dans un contexte plus global. La colère sociale et l’exaspération écologique ne sont ni soudaine , ni inattendues . Elle sont le fruit d’une autre violence, une violence qui ne dit son nom, une violence masquée.

La violence institutionnelle, bureaucratique, celle des politiciens vérolés par les mensonges et les conflits d’intérêts, la violence d’un gouvernement qui n’a aucune réelle légitimité représentative, la violence encore à l’oeuvre envers tous les personnels suspendus de leur fonctions de leurs droits sociaux pour refus de l’obligation de l’injection anti covid… Un gouvernement aux abois réduit à l’usage du 49/3 pour faire passer ses réformes et à la violence d’état pour traumatiser, brutaliser la sensibilité du peuple et le soumettre par la peur. Peur de l’épidémie meurtrière (pour un taux de mortalité inférieur à 0,5%), peur de l’invasion russe de l’Europe, peur des coupures d’électricité et de gaz …

Un gouvernement qui use et abuse du déni, du mépris, de l’humiliation, de la surdité, de la rigidification.
Il est médiatiquement  efficace et impactant sur l’opinion de montrer des images de casseurs et de militants radicaux entrain de se défendre des exactions policières. Mettre en évidence et montrer l’extrême violence des décisions cravatées prise dans le confort feutré des bureaux élyséens relève d’une autre difficulté. Les premières n’étant que le résultat attendu de ce que certain appelle le gouvernement par le chaos. 

Il y a des précédents dans l’histoire, qui saurait le nier. Jamais dans l’histoire les chemins de la violence pris par la contestation, les oppositions , les dissidents, n’ont été légaux, mais toujours ils ont été légitimes pour sortir des impasses doctrinaires et meurtrières d’une violence d’état. Comme pour illustrer mon propos, quelques jours après les évènements de Sainte Soline, le président  présente son « plan eau », sans aucune considération pour ce qui s’est passé dans les Deux Sèvres et surtout, mais pourquoi s’en étonnerait on, sans aucune ouverture à un dialogue avec les associations, les paysans, les écologistes, qui contrairement à ce qui est relayé par les médias et le pouvoir, sont de réelles forces de propositions pour préserver ce bien partagé le plus précieux dont nous dépendons, l’eau.

En guise de quoi, il nous promet plus de centrales nucléaires, plus de Data center, une conversion à l’électrique de tout le parc automobile, la poursuite d’une agriculture productiviste, autant de décisions qui organisent et systématise le pillage, la destruction des ressources et la raréfaction de l’eau !

Denys Holder

– Reporterre le 28/03/23 : Contre les mégabassines, une mobilisation massive et fortement réprimée

– Reporterre le 29/3 par Hervé Kempf : Après Sainte Soline repenser la lutte

– Sur France culture :

Le 31 Juillet 1977, sur le site prévu pour la centrale nucléaire Superphénix et le 25 octobre 2014, sur le site promis au barrage de Sivens, les militants écologistes Vital Michalon et Rémi Fraisse sont tués par des grenades offensives de la gendarmerie. Souvenirs de leurs proches.

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